11 février 2009

Cinéma, la suite

Je suis allée au cinéma. Je m'en confesse. Bien que la tribune choisie soit justement celle qui permette ce genre de contradiction. Certains blogueurs, qui ont senti la nécessité d'intellectualiser leur travail, ou de se conforter dans l'idée d'écrire par besoin primaire et d'exhiber le fruit de leur délivrance dans la seconde qui suit, ont défini l'art du ''blog'' comme étant le sport extrême de l'écriture, celui qui permet de dire et de se contredire le lendemain, au risque de passer pour fou. Guillaume Lemay-Thivierge et moi avons donc autre chose en commun (en plus d'être les deux seuls à se souvenir qu'il a joué dans la série Avoir su... en 1991.).

Je suis allée au cinéma pour une excellente raison, cependant. Pour manger des figues. Non, les figues n'ont pas remplacé la sauce au ''fromage'' jaune fluo sur le menu des cinémas au cours de la nuit dernière. Seulement, il y a de ces associations complètement aléatoires que l’on forme un jour et que l’on cherche à recréer invariablement, comme si l’on pouvait de cette façon retrouver l’état exact qui avait laissé en soi une si bonne impression ce jour-là. De là naissent toutes les habitudes réconfortantes qu'il nous est impossible de ne pas répéter (louer un chalet de ski avec des amis, organiser un shower, dire ''Ha, ha, Familiprix! quand quelqu'un tombe, etc.). On est en terrain connu, alors on respire bien.

C’est le cas, pour moi, des figues et du Cinéma du Parc. Le fait d’acheter des figues systématiquement avant la présentation du film - pas au cinéma mais à l'épicerie d'à côté - et de n’en acheter jamais sinon là, me remplit d’une sérénité totalement injustifiée, ou plutôt justifiée uniquement par l’impression d’avoir une habitude de plus, vraiment spéciale celle-là, donc une personnalité plus étoffée, une vie valant davantage le coup d’être vécue. Mon visage s'illumine, comme celui du gars qui promène à tous les jours son cochon domestique obèse sur un skateboard, rue Mont-Royal, entre Fullum et Papineau. Un visage glorieux.

Et je trottine jusqu’à la salle de cinéma, des figues fraîches en guise de cochon obèse, bien au chaud dans une habitude que je me suis implantée moi-même de force (pas tant celle de manger des figues au cinéma que celle de me donner des airs de snob dans un endroit public). S’il est une solitude que je préfère, c’est exactement celle où l’on n’admet pas que tous les comportements que l’on adopte pour créer quelque artifice autour de soi sont en réalité un moyen de se convaincre que la compagnie que l’on n’a pas serait de toute façon encombrante et superflue. Dans ces conditions hautement dramatiques, au scénario ultra rigide, je peux, si je focalise bien sur mes figues et non sur les vêtements du public, apprécier une sortie au cinéma.

Je vous laisse deviner quel personnage est le plus risible.

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