4 avril 2009

Réformes

D'un changement mineur, sans incidence réelle sur l'existence sinon qu'on le constate, un certain pourcentage de gens ne se remettra jamais. Il préférera abandonner l'habitude plutôt que d'assimiler la nouveauté, ou restera présent juste pour souligner à quel point ''c'était mieux avant''. La portion sensée de la population aura assez d'esprit pour admettre qu'elle ''s'était habituée'' à la situation d'avant, et que c'est la perte de repères qui crée l'inconfort.

La création d'une nouvelle page d'accueil Facebook, par exemple, nécessairement opérée dans le but d'optimiser le produit et non de faire suer les utilisateurs, fait trembler la terre et soulève un tollé. Il faut ne pas avoir eu de frères jumeaux cadets pour se sentir bousculé à rien et se méprendre sur ce qu'est la vraie intention de faire suer quelqu'un.

Moi qui me croyais à l'abri, je me rends compte de mes propres résistances quand j'apprends que la réforme orthographique permettra dorénavant l'utilisation du mot ''flute'' sans accent ou du mot ''ambigüité'' avec le tréma sur le u. Pardon? J'ai toujours eu du mal à accepter de travailler dans le vide, même si le dit travail date de 1988, à l'école primaire. Les changements sont plus difficiles à accepter lorsqu'ils remettent en question un apprentissage qui ramène un sentiment ou qui est relié à une époque qui nous est chère.

Me demander, à mon âge, de faire mon deuil des pronoms ou des propositions sous prétexte que certaines règles soient désormais caduques et difficiles à retenir? (Certains confrères de classe consanguins et légèrement déficients sont pourtant parvenus à les assimiler.) Il en faudra plus que ça pour me convaincre. Je serai la vieille chipie qui n'acceptera jamais d'écrire ''cout'' sans accent ou ''portemonnaie'' sans trait d'union (à en croire mes exemples, je serai aussi une vieille chipie radine). Si je me fâche pour vrai, je suis capable de forcer mes enfants à écrire l'ancien françoys.

Je comprends mieux maintenant pourquoi il fût si difficile de sortir Dieu des maisons.

Mais le cerveau est un muscle. Le cerveau de la collectivité aussi, mais en plus mou. À force de modifier la page d'accueil de Facebook et d'enlever des trémas ici et là, on éclabousse les gens mais on arrive peut-être à prédisposer les mentalités à des changements plus significatifs, si bien que certaines personnes que l'on croyait roulées dans le petit catéchisme et coulées dans le béton finissent par faire des propositions pour le moins surprenantes. Nos voisins, parfois, que l'on croyait stationnés dans leur obscurantisme et qui soudainement prennent une longueur d'avance.

D'autres, à l'inverse, marchent à reculons en-dessous de la soutane du Pape. D'ailleurs, peut-on voter au passage pour l'abolition de cette ridicule majuscule?

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